Dans le passé, on considérait que la multiplication d’options génératrices de variantes de produits devait être évitée à tout prix : la complexité qui en résultait avait en effet des effets négatifs sur la lisibilité de l’offre, les coûts, les délais ou la qualité du produit. Des techniques marketing ont été développées pour assembler les options sur la base de l’analyse des préférences des clients ou d’autres techniques plus avancées.

La tendance actuelle est à la personnalisation maximale des produits et services, chaque client ou chaque demande étant considéré comme unique. Cela conduit à une prolifération sans précédent des variantes et soulève évidemment la question de la pertinence de proposer toutes ces variantes au regard de leur rentabilité, leur valeur client, et, de manière générale, leur attractivité pour les consommateurs. Mais ici, le véritable sujet est moins de décider s’il est préférable de proposer telle ou telle variante que d’aider le client à s’orienter entre ces variantes : le danger est en effet de perdre le client dans une surabondance de choix. Alors, comment procéder ? L’approche proposée ici consiste à combiner l’analyse de la valeur à des techniques de modélisation des coûts pour dessiner des chemins personnalisés et optimisés qui permettront aux clients de s’orienter parmi les options proposées.

En théorie, cette approche simple repose sur 4 phases :

  • la prolifération
  • la cartographie des options et de leurs incompatibilités
  • le calcul du rapport qualité-prix de chaque variante (!)
  • le tri des variantes par scores décroissants et l’élaboration des chemins de navigation envisageables fondés sur ce classement des variantes

La phase de prolifération est simple. Une méthode consiste à décomposer le produit en composants et à imaginer les possibilités de personnalisation de chacun de ces composants. Par exemple, un milkshake pourrait être décomposé en 4 composants (la tasse, le liquide, la garniture, la paille), chacun d’entre eux avec de multiples choix possibles. Mais les techniques alternatives sont nombreuses : nous pourrions par exemple prendre en compte l’usage et le contexte d’usage du produit comme source d’inspiration pour déterminer les variantes des produits.

La phase de cartographie des options est elle aussi simple, mais nous voudrions ici mettre en évidence une représentation graphique qui s’avère utile. La première idée qui viendrait à l’esprit serait de dessiner un arbre à options : cette approche est intuitive mais soulève une question majeure car elle présuppose de privilégier un chemin pour représenter les options. La représentation que nous proposons ici ne classe pas les options entre elles. Le principe est de positionner l’ensemble des options autour d’un cercle et de tracer les liens entre les options compatibles : autrement dit, deux options qui ne sont pas reliées sont considérées comme incompatibles. L’avantage clé de cette technique est qu’elle rend possible la simulation de chemins de choix en sélectionnant progressivement les options sans ordre prédéterminé avec l’unique contrainte que toute nouvelle option ajoutée doit être reliée à chacune des options précédemment sélectionnées. Mais notez bien qu’il n’est pas nécessaire de dessiner physiquement un tel diagramme car cela peut s’avérer fastidieux et complexe : mais une représentation de ce genre doit être traitée par ordinateur pour formaliser les choix et les incompatibilités, et établir les chemins de sélection des options.

La phase 3, qui consiste à évaluer le rapport qualité-prix de chaque variante, peut être considérée comme la partie la plus astucieuse de l’approche vu que des millions de variantes doivent être évaluées. Mais le marketing a déjà trouvé la solution à ce type de problème il y a plusieurs décennies : l’analyse conjointe, et plus spécifiquement l’« analyse conjointe adaptative », selon la dénomination consacrée, qui répond exactement à ce genre de problème. L’objectif du présent article n’est pas de détailler ce qu’est l’analyse conjointe, mais simplement de rappeler que ce genre de technique repose sur des questionnaires assistés par ordinateur et s’appuie sur des théories statistiques qui fournissent un modèle mathématique d’évaluation du rapport qualité-prix basé sur les attributs de produits et les niveaux sélectionnés (pour en savoir plus, cf. l’article « Applied Conjoint Analysis » de Vithala R. Rao, 2014 – Chapitre 5 du livre «  Methods for a Large Number of Attributes »). La seule « astuce » ici est d’évaluer les impacts d’une option individuelle en termes de prix (coût + marge), de délai ou de qualité de produit et d’intégrer ces paramètres dans la modélisation et le calcul du « rapport qualité-prix ».

La phase 4 consiste à trier les variantes par rapport qualité-prix décroissant et de déterminer les chemins de navigation envisageables en se basant sur ce classement des variantes. La représentation avec un cercle aide beaucoup dans la mesure où, à un stade donné du processus de sélection des options, toutes les options possibles sont identifiées et évaluées : il est alors possible de ne proposer que les options qui ajoutent le plus grand rapport qualité-prix, ce qui simplifie significativement le processus de personnalisation et offre une expérience client satisfaisante.

 

Mais l’on pourrait objecter à ce stade que le problème est moins de simplifier l’expérience client que de trouver des solutions qui permettent à l’organisation, aux unités de production ou à la logistique de gérer la complexité sans coûts ou délais supplémentaires ou sans impact sur la qualité : nous en sommes d’accord, mais cette question dépasse le simple cadre de la discipline « Ventes & Marketing ».